Quand y-a-t-il licenciement verbal et donc licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

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Quand y-a-t-il licenciement verbal et donc licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

Le licenciement verbal est l’annonce par l’employeur de sa décision irrévocable de licencier un salarié. Si cette annonce faite au salarié lui-même ou à des tiers, intervient avant l’expédition de la lettre de licenciement, ce dernier, quels s’en soient les motifs, sera invalidé. 

Pourquoi le licenciement verbal est forcément un licenciement sans cause réelle et sérieuse ? 

Le licenciement verbal est sans cause réelle et sérieuse parce que quand l’employeur annonce verbalement au salarié sa décision de le licencier, il ne lui fait pas connaître les motifs du licenciement et même s’il lui fait des reproches, on constate qu’il a pris sa décision sans respecter la procédure de licenciement, c’est-à-dire sans permettre au salarié de se justifier des motifs invoqués contre lui lors de l’entretien préalable.

De même, l’employeur n’a alors pas respecté le délai de réflexion de 48 heures qu’il doit observer avant de notifier la décision de licenciement. 

Si l’employeur se contente d’annoncer au salarié l’envoi de sa lettre de licenciement, y a-t-il licenciement verbal ?

S’il annonce au salarié l’envoi de sa lettre de licenciement, l’employeur doit alors prouver qu’il a déjà expédié cette dernière.

La Cour de Cassation s’est prononcée récemment (3 avril 2024, n°23-10.931) sur le cas d’une DRH qui avait informé par téléphone un salarié qu’il allait recevoir une lettre de licenciement pour faute grave et que soi-disant par égard pour lui, il ne fallait pas qu’il se présente le lendemain au bureau avec l’humiliation d’être expulsé de la société devant ses collègues.

Le seul fait d’annoncer au salarié son licenciement avant l’envoi de la lettre de licenciement caractérise un licenciement verbal.

Qui doit prouver le licenciement verbal, et donc le fait que l’annonce du licenciement est intervenue avant l’expédition de la lettre de licenciement ?

Par un précédent arrêt du 23 septembre 2022 (n°21/15.606), la Cour de Cassation avait débouté un salarié au motif qu’il ne prouvait pas que l’employeur avait expédié la lettre du licenciement après son appel téléphonique.

Or, si le salarié peut savoir, grâce au cachet postal, à quelle date la lettre a été expédiée, en revanche, s’il s’agit d’un envoi qui intervient à même date que l’appel téléphonique, il n’a aucun moyen de connaître l’heure d’expédition.

C’est à l’évidence ce qu’a récemment pris en compte la Cour de Cassation. Le salarié doit de son côté prouver le licenciement verbal, soit l’annonce du licenciement. C’est à l’employeur de démontrer qu’il a, quand il appelle le salarié, déjà expédié la lettre de licenciement.

Comment le salarié peut-il prouver le licenciement verbal ?

Souvent, le salarié est, soit dans l’impossibilité de prouver qu’il a reçu une annonce verbale de licenciement, soit il prouve qu’il y a eu annonce mais les propos tenus ne reflètent pas suffisamment le caractère irrévocable de la décision.

Ce sont alors les agissements de l’employeur qui vont lui permettre de démontrer le licenciement verbal.

La Cour d’Appel d’Angers, par un arrêt très intéressant du 27 janvier 2022 (n°19/00625) précise que la preuve du licenciement verbal « peut résulter du fait que l’employeur signifie oralement et sans ambiguïté que le contrat est d’ores et déjà rompu ou bien se déduire des actes positifs de l’employeur, tel que le retrait des moyens matériels permettant au salarié d’exécuter son contrat de travail, la remise d’un certificat de travail et d’un reçu de solde de tout compte, le jour de l’entretien préalable, ou l’interdiction au salarié de paraître dans l’entreprise, sans qu’il ait fait l’objet d’une procédure de mise à pied conservatoire. »

La dispense de poste entraîne-t-elle le licenciement verbal ?

De plus en plus fréquemment, le salarié à qui l’on remet une lettre de convocation à un entretien préalable au licenciement, reçoit instruction de quitter immédiatement l’entreprise :

  • soit dans le cadre d’une mise à pied conservatoire non rémunérée,
  • soit dans le cadre d’une dispense de poste rémunérée.

Dans l’un et l’autre cas, il lui est interdit de revenir à l’entreprise.

Très souvent aussi, on lui retire immédiatement les accès à sa messagerie professionnelle et ce même s’il n’est que dispensé de poste.

Cette éviction physique brutale de l’entreprise est interprétée par tous, en interne et en externe, comme un départ définitif.

Il est extrêmement rare en effet qu’un salarié qui a fait l’objet d’une mise à pied conservatoire reprenne ses fonctions à l’issue de la procédure de licenciement.

C’est encore plus rare pour le salarié qui a été dispensé de poste puisque rien ne justifiait une telle mesure, sauf le désir d’accélérer son départ physique, avec donc la preuve que la décision de licenciement était irréversible.

Pour accorder le licenciement verbal à un salarié qui ne pouvait suffisamment justifier de « la décision irrévocable de l’employeur » au moment de l’annonce du licenciement », la Cour d’Appel d’Angers retient :

  • « et surtout, il dispense Monsieur X de se présenter dans les locaux de la société dès avant l’entretien préalable, sans la moindre référence à une mise à pied conservatoire. En tout état de cause, le licenciement de Monsieur X est un licenciement pour insuffisance professionnelle et n’a donc aucun caractère disciplinaire ».

Y a-t-il licenciement verbal quand l’annonce du licenciement est faite à des tiers ?

Le licenciement verbal est caractérisé dès que l’employeur a annoncé sa décision de licencier le salarié « de façon irrévocable et sans ambigüité ».

Si le salarié prouve qu’une telle annonce a été faite en son absence aux représentants du personnel (Cassation Sociale 23 octobre 2019, n°17-28.200) ou encore que son équipe a été avertie de son éviction de l’entreprise, il aura gain de cause.

Quelles conséquences en cas de licenciement verbal ?

Il s’agit d’un licenciement non motivé puisque la lettre de licenciement motivée ne parviendra au salarié que dans un second temps. C’est donc un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Si le salarié saisit le Conseil de Prud’hommes, il percevra les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fixés par le barème Macron en fonction de l’ancienneté (article 1235-3 du Code du Travail).

Si le salarié a été licencié pour faute grave, il percevra en sus son indemnité de préavis et son indemnité légale ou conventionnelle de licenciement dont il aura été privé dans un premier temps.

Le salarié sera ainsi indemnisé, quels que soient la nature et la gravité des fautes ou insuffisances qu’il aura pu commettre avant son licenciement.

 

L’employeur est, en cas de licenciement verbal, sanctionné avec sévérité alors que quand il licencie le salarié sans avoir procédé à l’entretien préalable, il ne s’expose qu’à un mois de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement et ce uniquement pour le cas où le licenciement serait au final considéré comme sans cause réelle et sérieuse. Dans le cas contraire, l’indemnité d’un mois sera amalgamée avec les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.


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