Alcool, tabac, vapotage au travail : règles et sanctions

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Alcool, tabac, vapotage au travail : règles et sanctions

Peut-on boire de l’alcool sur son lieu de travail, peut-on, sinon fumer, à tout le moins vapoter ? Cadre Averti fait le point de ce qui est permis  et de ce qui est interdit et précise quelles sont les sanctions encourues.

Boire de l’alcool au travail est permis

C’est ce que précise l’article R.4828-20 alinéa 1er du Code du Travail selon lequel :

- « Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail. »

Seuls sont donc interdits les alcools forts, cognac, whisky et les apéritifs alcoolisés qui contiennent d’autres substances que le vin tels que l’anis et la réglisse pour le pastis.

En revanche, le vin de champagne et celui de Porto sont admis, au même titre que le poiré, boisson alcoolisée effervescente obtenue par fermentation de jus de poire, qui serait, non pas nocive, mais bénéfique pour la santé puisque « limitant l’absorption des graisses au sein du repas ».

A noter que le Code du travail, s’il permet expressément certains alcools sur les lieux de l’entreprise, n’en limite pas la quantité !

Au moyen du règlement intérieur, l’employeur peut limiter sinon supprimer tout alcool au sein de l’entreprise

L’employeur est responsable de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Or, l’alcool est généralement considéré comme nocif pour la santé, et absorbé en grande quantité, il peut occasionner des risques pour la sécurité.

En cas d’absence de vigilance sur la consommation d’alcool au sein de son entreprise, l’employeur risque une amende maximum de 10 000€ pour chaque salarié visé par le problème d’alcool.

Voilà pourquoi le 2ème alinéa de l’article R.4228-20 du Code du Travail précise :

- «  Lorsque la consommation de boissons alcoolisées dans les conditions fixées au premier alinéa est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur, en application de l’article L.4121-1 du Code du Travail, prévoit dans le règlement intérieur, ou à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d’accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché. »

L’employeur ne se prive généralement pas de limiter au maximum l’usage de l’alcool dans l’entreprise, le réservant exclusivement à l’occasion des repas. S’il entend en interdire totalement l’usage, il doit justifier des raisons. Ce peut être le cas si le salarié effectue des taches demandant une grande précision, tel que le maniement d’outillage ou de machine, et nécessitant donc la plus grande concentration, ce qui exclut toute consommation d’alcool.

Toutefois, une telle interdiction étant attentatoire à la liberté individuelle, puisque le salarié qui le désire, doit pouvoir consommer l’un des alcools autorisés par la loi sur le lieu de travail, l’employeur devra justifier de façon précise des raisons de l’interdiction.

Ainsi, il ne pourra pas, au nom de la solidarité, étendre à tout le personnel de l’entreprise une interdiction de consommation d’alcool qui n’est justifiée que pour la catégorie de salariés exerçant des postes sensibles.

Peut-on être licencié pour avoir consommé de l’alcool au travail alors que c’était interdit ?

Heureusement, le licenciement n’est pas automatique, tout dépend de la gravité de la faute.

Ainsi,  un chef d’équipe pompiers était licencié pour avoir bu du rosé à deux heures du matin avec deux autres collègues.

Or, s’agissant d’une usine sidérurgique, le règlement intérieur de l’entreprise interdisait toute consommation d’alcool.

Le salarié qui avait saisi le Conseil de Prud’hommes, se voyait débouté par ce dernier ainsi que par la Cour d’Appel. Ce n’est que devant la Cour de Cassation qu’il obtenait gain de cause au motif que « la consommation d’alcool sur le lieu de travail ne constitue une faute grave que si elle a eu des répercussions sur l’entreprise ; qu’en considérant qu’une faute grave pourrait être reprochée à Monsieur Z… du fait qu’il aurait consommé du vin à la table de la cuisine du poste de secours où les pompiers en service de nuit devaient se tenir, sans constater que le comportement de Monsieur Z… aurait eu une quelconque répercussion sur l’entreprise, la Cour d’Appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.1232-1 du Code du Travail. » - (7 décembre 2016 - Cour de cassation n° 15-24.565)

Par ailleurs, toujours selon la Cour de Cassation :

- « La consommation d’alcool par un salarié ne constitue pas une cause réelle et sérieuse quand elle est exceptionnelle ; qu'en considérant que la circonstance qu'il s'agissait pour Monsieur Z…, qui n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche similaire pendant 37 ans de carrière, de fêter son anniversaire, ne permettrait pas d'écarter la qualification de faute grave, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-1 du code du travail (selon lequel tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse) ; »

Y a-t-il un endroit où l’on peut fumer dans l’entreprise ?

Selon le Code de la santé publique (articles L.3512-8 et R.3512-2), il est interdit de fumer dans tous les locaux d’entreprise fermés et couverts, à savoir :

  • les bureaux, collectifs et même individuels où d’autres personnes sont susceptibles de pénétrer ;
  • les locaux d’accueil et de réception ;
  • les locaux de restauration collective ; 
  • les salles de réunion ;
  • les salles de loisirs et de repos.

Ce n’est donc qu’à l’extérieur des locaux (cours, jardins etc.) que les salariés ont la possibilité de fumer. Ils peuvent également fumer dans leur voiture de fonction qu’ils sont censés utiliser seul, mais le règlement intérieur peut le leur interdire pour le cas où ils seraient amenés à transporter d’autres salariés.

Enfin, le lieu où le salarié peut fumer dans l’entreprise est le « fumoir », espace clos et couvert réservé aux fumeurs, doté de fermetures automatiques et d’un système d’extraction d’air. La superficie du fumoir ne peut pas dépasser 35m2 ni excéder 20% de la surface de la totalité de l’entreprise.

L’employeur n’est nullement obligé d’installer un espace fumeur, quel que soit l’effectif de l’entreprise.

Quelles sanctions pour le salarié pris en flagrant délit de fumer ?

Le salarié qui fume dans les locaux de l’entreprise s’expose tout d’abord au pouvoir disciplinaire de l’employeur qui a l’obligation de faire respecter la législation anti-tabac prévue par le Code de la santé publique dans l’entreprise.

La sanction peut aller du simple avertissement à la faute grave mais en respectant le principe de proportionnalité de la sanction à la gravité de la faute commise.

La sanction infligée à un salarié pris pour la première fois en train de fumer dans un couloir, ne sera pas la même que celle concernant un salarié récidiviste, ou pire, un salarié qui fume en toute connaissance de cause à proximité de produits inflammables, telle qu’une « pompiste ».

Par ailleurs, le salarié pris en flagrant délit de fumer s’expose à une amende forfaitaire de 68€.

Le salarié exposé au tabagisme passif peut-il poursuivre l’employeur ?

Le tabagisme passif consiste à inhaler des fumées provenant de cigarettes consumées à proximité par des fumeurs.

Le salarié qui démontre qu’il partage le bureau d’un fumeur compulsif sans que l’employeur n’intervienne pourra faire condamner l’employeur à plusieurs titres.

Tout d’abord, il pourra procéder à une prise d’acte de rupture de son contrat de travail ou à une démission motivée et saisir le Conseil de Prud’hommes pour demander la requalification en licenciement fautif de la part de l’employeur, avec les indemnités correspondantes.

Il pourra faire condamner l’employeur pour non-respect de son obligation de résultat d’assurer la santé des travailleurs en faisant respecter dans les locaux de l’entreprise la législation anti-tabac.

Il pourra réclamer une indemnisation spécifique s’il démontre qu’il y a eu atteinte à sa santé, par exemple en raison d’un taux de nicotine important dans son organisme alors qu’il n’est pas fumeur.  

Enfin, de même que le salarié pris en flagrant délit peut être condamné à une amende forfaitaire de 68€, l’employeur qui le laisse fumer encourt de son côté une amende forfaitaire de 135€.

Où peut-on vapoter au travail ?

Le Code de la Santé Publique interdit également le vapotage dans les locaux de l’entreprise, mais de façon plus souple que pour la cigarette. Le vapoteur peut, outre le fumoir quand il en existe un, également fumer dans les locaux fermés et couverts à usage collectif qui accueillent du public (Code de la santé publique, article R.3513-3) ce dans la mesure où le public a, lui, le droit de vapoter. Il peut également vapoter dans des bureaux individuels.  

En revanche, il est interdit de vapoter dans les locaux à usage collectif, en présence d’autres salariés, tels que les « open spaces » ainsi que dans les salles de réunion.

Le salarié pris en flagrant délit de vapoter s’expose à une amende plus faible de 35€, tandis que l’employeur qui l’a laissé vapoter risque, lui, une amende forfaitaire de 68€.

Enfin, de même que pour le tabagisme passif, le salarié exposé au vapotage de ses collègues, peut rechercher la responsabilité de l’employeur qui est contraint à une obligation de résultat concernant la législation anti-tabac au travail.

À propos de Cadre Averti

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